Denis MARY, un enfant de huit ans témoin de la Bataille de Normandie

Mis à jour le 09/01/2024

Denis Mary est un des plus jeunes témoins de la bataille de Normandie de 1944, et c’est pourquoi il participe aux 7O voix pour la liberté au lycée agricole d’Alençon. Dès le mois de juillet 1940, alors qu’il a quatre ans, un élément de compagnie allemande s’installe dans son village, à Saint-Hilaire-de -Briouze (Orne). Il se souvient d’avoir été effrayé par le défilé quasiment quotidien des soldats dans le bourg où sa famille habite.

L’enfant de huit ans dans la guerre

C’est à partir du 6 juin 1944 que les souvenirs se précisent pour lui, au point qu’il peut raconter les événements au jour le jour. A son réveil, il entend les bruits du Débarquement qui se déroule pourtant à 60 kilomètres de là. Pendant deux mois et demi, il entend quotidiennement le bruit des avions de chasse, qu’ils soient Alliés ou Allemands. Il est témoin de la plus grande bataille aérienne d’Europe où, pendant plus de deux heures une centaine d’avions se pourchassaient au-dessus de sa tête. Pendant la période du 12 au 18 août, entre les deux grandes batailles de Mortain et de Chambois, il connaît les horreurs d’un champ de bataille. Avec les siens, et au milieu des soldats allemands qui occupent la maison familiale et son environnement, il a vécu un bombardement aérien le 12 août au soir. À la suite de quoi, avec une trentaine de personnes de sa famille et amis terrée sous un petit pont fluvial qui traverse la ligne du chemin de Fer, il attend la  Libération  qui s’est faite soudain le 18 août au matin.

Après la bataille de Normandie

Après le silence des armes il retrouve la maison familiale et le bourg de son village détruits à 80 %. Les animaux sont morts, les arbres sont déchiquetés. C’est la désolation. Après la présence des SS, il connaît celle des soldats américains, surtout ceux du génie, chargé de réparer les voies de circulation, pour les troupes alliées. Avec ses frères, il fait l’inventaire des engins militaires allemands abandonnés sur le terrain, y cherchant des roulements à billes ou autres objets intéressant les enfants. Plus d’école, plus d’église, plus de presbytère, presque toutes les maisons sont éventrées, des carcasses de chars ou de voitures militaires sont plus ou moins calcinées, Tino un copain d’école tué, voilà l’univers dans lequel il vit. La vie ordinaire reprend son cours progressivement, jusqu’à ce que les cloches se mettent à sonner le 8 mai 1945. Il veut participer personnellement à la fête, malgré ses petites capacités. Avec tout le village il visite en 1947 les plages du Débarquement entre Ouistreham et Arromanches. La plage n’est pas encore complètement nettoyée, le port artificiel est resté tel qu’après la bataille. Devenu collégien, à 12 ans, il voit le centre de Flers (Orne) non reconstruit. Jusqu’au 1er janvier 1949, pensionnaire, il connaît le rationnement alimentaire.

Toute une vie marquée par la guerre

Souvenirs d’enfant, restés gravés et qui marquent une vie. Les premières images qui sont dans sa mémoire sont des images de guerre. Toute sa vie est regardée à travers ce filtre. Il prépare pour sa famille une journée pour faire mémoire de son grand-père, mort le 3 octobre 1914 sur le champ de bataille, près d’Arras. Soldat de 1957 à 1959, il n’a pas fait la guerre en Algérie, ce qui ne l’a pas empêché d’avoir souffert de cette guerre.
Après des études secondaires à Flers, il fait des études de théologie à Sées (Orne). Devenu prêtre dans l’Église catholique, il a exercé sa profession dans le département de l’Orne au service de l’évêque de Sées, spécialement auprès des jeunes pendant 35 ans. Actuellement retraité il habite à L’Aigle, en étant spécialement présent auprès des étrangers tant du point de vue religieux que culturel. Il a écrit ses souvenirs de la Seconde Guerre mondiale


Publication
Un enfant de huit ans dans la guerre, L’Aigle, 2014, p.56.